Un chiffre brut : GPT-4, comme ses prédécesseurs, n’a jamais mis les pieds sur Internet. Pas une seule requête en direct, pas la moindre exploration de base de données privée depuis la fin de son entraînement. Ce modèle, façonné par OpenAI, se nourrit d’une mémoire figée, un gigantesque patchwork de textes publics, de livres, d’articles et de pages web, collectés avant avril 2023. Pas d’actualisation en temps réel, pas de mises à jour furtives : GPT-4 répond avec ce qu’il a appris, un point c’est tout.
Tout ce qui sort de GPT-4 s’arrête donc à une date de coupe nette : avril 2023. Cette temporalité crée un écart permanent avec l’actualité brûlante, ce qui interroge la fiabilité de ses réponses. Les utilisateurs s’interrogent aussi sur la confidentialité de leurs échanges avec l’IA : que deviennent vraiment les données transcrites lors de chaque requête ?
Plan de l'article
Comprendre d’où viennent les connaissances de GPT-4
La mécanique de GPT-4, signée OpenAI, s’appuie sur l’architecture Transformer, désormais incontournable dans le traitement du langage naturel. Rien de caché, mais un panel soigneusement calibré de textes venus de tous horizons, dont la variété mérite d’être soulignée. Pour éclairer cette diversité, voici les grandes familles de sources exploitées lors de l’entraînement :
- Données publiques d’internet : GPT-4 assimile un volume massif de pages web archivées, offrant un large panorama du contenu en ligne.
- Encyclopédies numériques : Les encyclopédies en ligne fournissent une base de connaissances structurée, généraliste et souvent vérifiée.
- Forums publics et articles de presse : Discussions, prises de position, revues d’événements, toute une diversité de points de vue qui enrichit la façon dont l’IA restitue des opinions ou relate des faits.
- Documents open source : Manuels, publications scientifiques accessibles sans restriction et guides techniques viennent densifier le socle documentaire.
- Sources professionnelles sous licence : À ces blocs s’ajoutent certaines bases compressées et spécialisées, accessibles via licences, pour aborder des domaines plus pointus.
Chaque catégorie subit un tri poussé : élimination des doublons, des contenus jugés non fiables ou répétitifs, contrôle statistique… Rien n’est laissé au hasard afin d’offrir une base relativement saine et cohérente. L’ensemble couvre l’essentiel des connaissances en circulation jusqu’à l’automne 2021, ce qui borne clairement l’horizon de GPT-4.
L’apprentissage ne se réduit jamais à une ingestion automatique de textes. Des experts supervisent, rectifient, affinent le procédé par un travail d’ajustement continu, basé sur les principes du renforcement supervisé. C’est ce maillage humain qui permet au modèle de gagner en nuance, de mieux formuler ses réponses et, parfois, de s’écarter des automatismes qui peuvent polluer la génération. GPT-4, dans tous les cas, se contente de refléter la matière qu’on lui fournit, sans jamais prétendre à l’impartialité ou à la totalité du savoir.
Confidentialité et gestion des données utilisateurs : ce que fait réellement ChatGPT
La gestion des requêtes saisies par les utilisateurs occupe désormais une place centrale dans le dialogue entre OpenAI, les régulateurs européens et les militants du droit numérique. Institutions, instances de protection de la vie privée et associations consacrent des ressources à l’examen minutieux des pratiques autour de la protection des données personnelles. Les inquiétudes se cristallisent notamment sur la flou qui subsiste quant à l’usage, la durée de conservation et la réutilisation des textes saisis par les utilisateurs du chatbot.
Dans les faits, tout ce que l’utilisateur envoie sert, en partie, à perfectionner le service. Selon les communications officielles, ce n’est qu’avec un accord explicite que ces données sont ensuite utilisées pour entraîner le modèle. Mais le principe n’efface pas certaines zones d’ombre : le traitement automatisé n’assure qu’une anonymisation partielle des conversations. Des enquêtes récentes l’ont montré, la réidentification reste possible, en particulier lorsqu’il s’agit d’informations sensibles partagées sans précaution.
Des organisations spécialisées et des chercheurs tirent la sonnette d’alarme sur le manque de clarté et les obstacles rencontrés par les personnes souhaitant exercer leurs droits (accès, suppression, rectification). Face à la pression, OpenAI promet des efforts en matière de transparence et de conformité, sans jamais ouvrir complètement la porte sur ses processus internes. La surveillance par les autorités extérieures reste partielle, au vu de la complexité et de l’opacité de certains rouages internes.
GPT-3.5 vs GPT-4 : quelles différences de précision et de fiabilité ?
L’écart entre GPT-3.5 et GPT-4 ne se résume pas à une simple inflation des capacités techniques. À chaque version, de nouveaux choix dans la collecte des sources, l’étendue des domaines couverts et la qualité des filtres appliqués à la masse documentaire. Pour GPT-4, des données issues de milieux professionnels et des ensembles sous licences spécifiques ont été intégrées, et le nettoyage des contenus a été poussé plus loin qu’avec GPT-3.5.
Côté restitution, GPT-4 bénéficie du renforcement via l’intervention d’humains qui corrigent le tir en cas d’erreurs, ce qui permet de réduire les approximations qui pouvaient frapper la génération précédente. Si GPT-3.5 se contentait parfois d’extrapoler, GPT-4 oriente davantage vers des réponses qui s’appuient sur des sources vérifiées, contribuant à limiter le fameux phénomène des « hallucinations » ou des informations erronées qui survenaient lors des échanges.
Quelques points concrets permettent de différencier les deux générations :
- GPT-3.5 fournit des réponses souvent plus rapides, traits larges, mais son niveau d’exactitude et de nuance fluctue d’un sujet à l’autre.
- GPT-4 parvient généralement à mieux référencer, contextualiser et apporter une vraie valeur ajoutée lors des questions complexes ou techniques.
Grâce à ces progrès, GPT-4 s’impose désormais sur les outils offrant un accès à la technologie de pointe, que ce soit via l’API OpenAI, ChatGPT Plus ou les moteurs d’assistance intégrée. Les retours d’expérience et les évaluations de chercheurs indépendants confirment une amélioration nette du taux de réponses fiables. Cette progression s’arrête toutefois à la date limite fixée lors de la phase d’entraînement et rappelle que, sans actualisation, toute requête liée à l’actualité la plus récente reste hors de sa portée.
Les limites de l’intelligence artificielle face au test de Turing et à la compréhension humaine
Impossible d’éluder la question : GPT-4 affiche des capacités remarquables, mais ses frontières sont tangibles. Son océan de textes issus d’archives, d’encyclopédies numériques, de forums ou de littérature scientifique ne comble pas l’écart qui le sépare de la compréhension humaine. Lorsqu’il s’agit d’humour, d’ironie, de sous-entendus ou d’interpréter des contextes entièrement nouveaux, l’IA révèle vite ses failles. GPT-4 manipule finement les mots, tout en demeurant étranger à leur chair réelle.
Trois limites structurent ce constat. D’abord, le modèle ne possède aucun accès au web en temps réel : la moindre nouveauté, le moindre événement après 2021, lui échappe totalement. Ensuite, les biais restent inévitables, puisque la sélection des textes ne peut éviter que certaines visions prennent le dessus, ni combler les angles morts. Enfin, la surveillance humaine, indispensable pour limiter les contenus problématiques, bride aussi la marge d’innovation brute du modèle. Difficile dans ce cadre de combiner sécurité, diversité, inventivité réelle.
Avec cette prise de recul, une chose se confirme : l’intelligence humaine conserve l’avantage. Décrypter l’ambiguïté, tisser du sens sous la surface des mots, sentir le contexte là où la machine chante une partition figée, voilà ce que l’algorithme ne peut pas égaler. GPT-4 repousse les lignes, mais reste cantonné à ce qui lui a été transmis. La frontière entre machine et humain n’a jamais été aussi nette, et il faudra plus qu’une évolution d’architecture pour la voir s’amenuiser.